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Lignes et lumières

Le château de Vogüé (Ardèche, près d’Aubenas) expose trois artistes, Florence Barbéris, Sylvie Deparis et Paule Riché, toutes trois installées dans le sud de la France (Gard et Hautes Alpes). Une exposition de qualité qui vient avec bonheur enrichir le regard de touristes venus, pour beaucoup sans doute, visiter un lieu chargé d’histoire. 

Des trois, nous connaissions Paule Riché, pour ses profondes et fortes encres sur papier, parfois immenses et qu’un souffle anime. Des paysages mentaux ou des formes abstraites, qui trouvent toujours un chemin vers un ailleurs familier ou lointain connu du seul spectateur. 

Le travail de Sylvie Deparis, qui part du dessin, suit la sève dans la tige, la branche, l’arbre, et cherche à dire ou à recréer la force du végétal ; elle obtient de subtils effets comme dans les Aiguilles de pins, lignes blanches sur fond noir (technique mixte sur intissé marouflé sur Dibond, 45 x 45 cm). 

Mais c’est de Florence Barbéris, la graveure du groupe, que nous voulons parler. Installée dans le Gard, elle s’est formée à la photographie avant de passer à la gravure aux Beaux Arts de Nancy et de Nîmes, avec une vingtaines d’années d’expositions derrière elle.  Son travail mérite l’attention. 

F. Barbéris, Plaque de métal, carborundum et encre de gravure, diam 80cm.
F. Barbéris, Plaque de métal, carborundum et encre de gravure, diam 80cm.

Ce sont parmi les oeuvres montrées ici les matrices elles-mêmes qui excitent le plus l’imagination  et la sensibilité : de grandes plaques de métal, grossièrement circulaires, de 80 centimètres de diamètre, disposées au sol, luisantes, brillent d’argent ou luisent de matités noires ou bleues selon le déplacement du visiteur. A leur surface, carborundum et encre de gravure composent des empreintes grainées un peu magiques, qui suscitent l’envie tactile de la caresse. L’envie de faire l’épreuve des aspérités de ce monde en miniature. Gravure ou sculpture ? Ce pourrait être de l’orfèvrerie en grand. Ce qui intéresse aujourd’hui, dit l’artiste, c’est de montrer le processus de travail : et vraiment, les plaques sans être passées sous la presse, valent pour elles-mêmes. 

F. Barbéris, Plaque de métal, carborundum et encre de gravure, diam 80 cm.
F. Barbéris, Plaque de métal, carborundum et encre de gravure, diam 80 cm.

D’un côté, sur les murs, des estampages sur papier chinois marouflé font rêver comme les cieux étoilés d’été. De l’autre, des gravures au carborundum, de plus petit format (30x30), toujours tirées à partir de plaques découpées  - pas une seule plaque rectangulaire ou carrée -  font vibrer sourdement les bruns, ou les bleus et les noirs. Il y a là du végétal, des écorces, des linéaments, des ciels nocturnes encore, des espaces lumineux. 

Je pense, sans savoir pourquoi, à Rimbaud : 

       « Elle est retrouvée. 

         Quoi ? - L’éternité »

         C’est la mer

        Alliée avec le soleil »

 

 

P.B.

 

 

"Lignes et lumières"

Château de Vogüé, 

2 impasse des Marronniers 07200 Vogüé

Du 7 juillet au 3 novembre 2019.

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