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Janina Konarska, artiste et femme dans les années trente.

C'est un achat indirect dans une salle des ventes, un bois gravé en couleurs sur un papier japon, numéroté 92, portant le timbre sec du Bois gravé lyonnais... Une estampe non identifiée, qui arrive en surplus dans un petit lot de bois gravés d'artistes des années trente. Si le prénom Jeanne est facile à lire, le nom de l'artiste ne l'est pas totalement. Anonyme, la gravure dort dans un carton pendant quelques années.

Et puis sur un site marchand, un hasard nous fait tomber ces jours-ci sur un autre bois gravé non signé mais attribué à Janina Konarska-Slonimska, graveure polonaise des années trente, dont le style se rapproche un peu du nôtre. Recherches faites sur le net, où les références sont nombreuses, l'artiste en question trouve aussitôt une biographie exceptionnelle et une carrière tout aussi remarquable.

Janina Konarska, Paysage de neige, vers 1933.
Janina Konarska, Paysage de neige, vers 1933.

Elle est née à Lódź le 30 avril 1900 dans une famille juive assimilée, sous le nom de Janina Seideman. Son père est un dilettante, ingénieur et musicien, et sa mère, une riche héritière. Elle fait ses études secondaires à Varsovie, puis commence des études pour devenir professeur de dessin. En 1918, elle prend le nom de Konarska. 

Dans les années 1919-1921, elle étudie à l'École des arts décoratifs, puis, dans les années 1921-1927, à l'École des beaux-arts de Varsovie, dirigée par Karol Tichy. Elève du grand graveur polonais Władysław Skoczylas, elle fait partie des premiers membres de l'Association des graveurs polonais (RYT). Elle devient en peu de temps une figure centrale de la bohème artistique de Varsovie, égérie de peintres ou d'écrivains.

Sa carrière artistique commence brillamment. Déjà pendant ses études, elle acquiert une réputation considérable. En 1924, elle reçoit un Grand Prix  à l'Exposition Universelle des Arts Décoratifs de Paris. Konarska expose ses œuvres lors de la première exposition de RYT en 1927, et deux ans plus tard au Département d'art de l'Exposition nationale générale. 

En tant que peintre et graveure, elle a beaucoup exposé, notamment à Amsterdam, Buenos Aires, Philadelphie, Londres, Lyon, Madrid, Milan, Montevideo, New York, Orléans, Padoue, Paris, Rome, Stockholm, Venise, Vilnius, Zagreb, ainsi qu'en Pologne (Bydgoszcz, Cracovie, Varsovie, Zakopane, Zamość). Elle a été lauréate de l'Exposition internationale d'art et de nombreux concours internationaux de gravure. 

En mars 1934, Janina Konarska épouse de manière inattendue l'écrivain Antoni Slonimski. Peintre et graveure au talent reconnu, elle semble réduire presque complètement ses activités artistiques, consacrant son temps à veiller à la santé, au confort et au bien-être de son mari. En 1937, elle reçoit à Paris le Grand Prix de l'Exposition Internationale des Arts et Techniques.

 

Janina Konarska, Skieurs, 1931.
Janina Konarska, Skieurs, 1931.

Les Slonimski fuient à Paris après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale en septembre 1939. Après la capitulation de la France, ils émigrent à Londres, où ils vivent plusieurs années. Bien évidemment, presque toutes ses oeuvres d'avant-guerre disparaissent, ce qui explique leur rareté et leur prix.

A l'automne 1951, ils retournent dans la Pologne communiste, provoquant l'indignation de l'émigration polonaise. Janina Konarska se remet alors à la peinture, sans chercher à exposer et à vendre. Ses œuvres d'après-guerre, peintes à la gouache, représentent des réminiscences de guerre, des maisons en ruines et brûlées, des rues détruites. Elle se concentre surtout à l'illustration de livres. 

Malade, elle meurt le 9 juin 1975, précédant son mari décédé en 1977 à la suite d'un accident de voiture, suspecté alors d'être une tentative d'assassinat réussie, l'écrivain étant devenu une icône de l'opposition politique polonaise à la suite de l'éviction de Gomulka.

 

Les gravures sur bois de Janina Konarska, très recherchées, représentent des images de saints, des scènes de genre, et des motifs sportifs. Fortement influencée par l'art populaire, elle développe rapidement son propre style. Grâce à ses sujets sportifs, elle est considérée comme une pionnière : femme et artiste, elle leur donne une tonalité et une orientation nouvelle. Moins intéressée par l'effort et la compétition que les artistes hommes, elle présente des vues plongeantes de stades, dans lesquels on voit joueurs et public, sans oublier l'environnement. Elle devient surtout célèbre internationalement grâce la médaille d'argent reçue au Concours olympique d'art et de littérature de 1932 à Los Angeles pour une série de bois gravés à thème sportif, dont Stadium et Skieurs (ci-dessus).

En 1977, la première rétrospective de peintures et œuvres gravées conservées de Janina Konarska a été organisée au Musée national de Varsovie. Le catalogue de l'exposition indique qu'elle était l'une des représentantes les plus remarquables de l'école de peinture de Varsovie de l'entre-deux guerre, à la fois en tant que graveure et en tant que peintre. 

 

 

 

Sources

Wikipedia.

Agata Olenderek, Janina Konarska-Slonimska, épouse aux mérites artistiques, Muzeum Getta Warszavskiego (Musée du Ghetto de Varsovie),  07.11.2022. (https://1943.pl/artykul/janina-konarska-slonimska-zona-z-artystycznymi-zaslugami/)

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